The Rolling Stones - Sticky Fingers (1971)


Le moins que l’on puisse dire, c’est que la fin des années 60 aura été chaotique pour les Rolling Stones. Entre les démêlés avec la police, essentiellement pour des histoires de drogues, amplement relatés par les médias (la fameuse histoire de Marianne Faithfull nue dans son manteau), le renvoie et la mort du fondateur Brian Jones ou encore la débâcle du festival d’Alamont qu’ils avaient contribué à organiser, il est certain que le groupe sentait le souffre. En revanche artistiquement le groupe est au sommet. Les compositions de Jagger et Richards sont devenues plus matures. Dans leur effort toujours constant de suivre le schéma de leurs potes les Beatles, ils ont commencé à prouver (avec Beggars Banquet et Let It Bleed) qu’ils pouvaient également sortir des albums de qualité et plus seulement des singles avec du remplissage. Au niveau du remplacement de Brian Jones (véritable prodige musical mais personnalité devenue vraiment trop instable), le groupe a frappé un grand coup avec le débauchage du jeune Mick Taylor, guitariste de John Mayall. Si le grand public a malheureusement oublié sa participation au groupe du fait de sa personnalité timide et assez opposée au charisme sensuel de Jagger et Richards (ou de son prédécesseur, l’ange blond des sixties, et son remplaçant, le frère jumeau de Keith), les fans considèrent encore aujourd’hui qu’il fut le meilleur guitariste des Stones et que la période où il participa au groupe fut la plus productive. Avoir un véritable soliste était également une question de survie pour les Stones à une époque où tous les nouveaux groupes de Rock présentaient des parties de guitares à couper le souffle (Santana, Led Zeppelin, Ten Years After ou encore Fleetwood Mac) ce que ni Keith Richards ni même Brian Jones n’étaient capables d’effectuer. 

En ce début des années 70, le psychédélisme a succombé suite aux morts successives de ses leaders (Hendrix et Joplin en tête) et à une certaine désillusion. Un nouveau son est né: le Hard Rock, le Blues durcit à l’extrême. Les Stones doivent donc montrer qu’ils peuvent être aussi sauvages que Led Zeppelin ou les Who, sans pour autant renier leur identité. Ce sera la lourde tâche de Sticky Fingers qui est souvent considéré comme le meilleur album du groupe. Celui-ci présente en effet un son plus sauvage (comme le prouve « Bitch », certainement un des meilleurs morceaux écrit par les Stones durant les seventies) tout en pouvant se montrer plus romantiques que jamais avec un morceau acoustique (l’influence de Gram Parson sur « Wild Horses », sans doute le titre le plus connu de l’album). Citons encore le tube de l’album, « Brown Sugar", qui donne la part belle à Bobby Keys, devenu saxophoniste officieux des Stones. C’est en effet à cet époque que les Stones vont se constituer une véritable équipe d’accompagnateurs. Outre Ian Stewart présent dès la formation du groupe, on trouvera Nicky Hopkins et Billy Preston aux claviers et Jim Price à la trompette. Même le mythique Ry Cooder viendra donner un coup de slide. Le talent de Mick Taylor, lui, explose sur « Sway » et surtout « Can’t You Hear Me Knocking » où son long solo mélodique prend la relève de celui de Keys. Pourtant malgré des participations évidentes dans le processus d’élaboration des morceaux (où il remplace plus d’une fois Keith Richards perdu dans les méandres de la drogue), il ne sera pas crédité, ce qui, comme pour Bill Wyman, contribuera à son insatisfaction qui mènera à son départ du groupe quelques années plus tard. Enfin, le groupe nous aussi une série de Blues bien crades (« You Gatta Move » - unique reprise de l’album - et « I Got The Blues ») et de titres Country (« Dead Flowers », « Sister Morphine » et « Moonlight Mile » qui annoncent l’album suivant). Avec cet album, les Stones prouvent qu’ils ne sont pas mort avec les années 60 mais au contraire prêts à entamer les années 70 avec un souffle nouveau.

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