Les hommages à Claude Rich se sont presque entièrement bornés à saluer sa participation aux Tontons Flingueurs. Pourtant, il serait injuste de résumer la carrière de l’acteur au cinéma à ce seul titre. S’il est vrai que la carrière de Rich a plus souvent été celle d’un grand second rôle (comme dans le film de Lautner ou encore dans l’adaptation au cinéma d’Oscar), il eut également quelques premiers rôles très intéressants. C’est le cas ici où il tient le premier rôle d’un film fort peu connu, Les Compagnons de la Marguerite de Jean Pierre-Mocky. Oublié aujourd’hui au profit de l’ennuyeuse Nouvelle Vague de la bande des Cahiers du Cinéma, le cinéma de Jean-Pierre Mocky durant les années soixante est pourtant extrêmement intéressant. Tout d’abord parce qu’il traite avec une certaine finesse et un humour corrosif de sujets complètement amoraux. Ensuite parce que Mocky, lui-même comédien de formation, donne la part belle aux acteurs dont certains lui doivent parmi leurs plus beaux rôles. C’est le cas de Jean Poiret, de Francis Blanche, de Bourvil… et de Claude Rich, même si ce dernier ne sera pas un collaborateur fréquent.
Ici, la cible principale de Mocky est l’hypocrisie des « liens sacrés du mariage », qui est à l’époque un passage obligatoire des « gens biens ». Et Claude Rich, rebaptisé ici Jean-Louis Matouzec (dit « Matou ») est justement pris au piège du sien. Sa femme a beau être ravissante (incarnée par la propre femme de l’acteur), elle est plus intéressée par sa télévision, autre cible privilégiée de Mocky, que par son mari. Le couple est d’accord d’être dans l’impasse, mais Françoise - la femme - refuse de divorcer. La procédure est longue et coûteuse et surtout à l’époque une femme célibataire est dans une situation précaire. Mais ‘Matou’ est un expert un écriture, chargé de restaurer de vieux manuscrits. Il lui vient alors une idée de génie: trouver un couple prêt à faire l’échange et falsifier les documents officiels. Il passe une annonce dans le journal qui attire l’attention d’un inspecteur de la brigade mondaine. Cet inspecteur, Maurice Leloup, c’est Francis Blanche, acteur comique complètement barré et une des têtes d’affiche des Tontons Flingueurs. Celui-ci se fait passer pour le mari d’un couple prêt à faire l’échange. Coup de chance pour Matou, madame Leloup est ravissante, tandis que Françoise semble satisfait du mari de substitution. L’échange se fait à la stupéfaction de Leloup qui se rend compte que la supercherie est absolument sans faille. Commence alors entre Matou et Leloup un jeu de chat et la souris qui verra de plus en plus de partisans côté Matou (dont l’inspecteur Papin, incarné par Michel Serrault) et dont la morale ne sortira - pour une fois - pas vainqueur.
Mocky s’attaque donc au mariage et à tout ce qui l’entoure: la difficulté pour un couple de vivre hors mariage, la difficulté pour une femme d’être célibataire, les longues, coûteuse et douloureuses procédures que sont les divorces. Mais il se moque également ouvertement d’autres instances telle que l’administration de l’état ou la police. L’humour de Mocky est fantaisiste, dénué de réalisme et finalement assez proche de ce qui se faisait en bande dessinée à la même époque. On y retrouve la même folie, le même esprit rêveur de bousculer l’ordre établi que chez Franquin. D’ailleurs Matou est un véritable rêveur anarchique comme l’était Gaston Lagaffe, à ceci près que Matou est un poète là où Gaston est paresseux. Le choix de Claude Rich pour incarner le personnage est judicieux. L’acteur au regard pétillant est un enfant dans un monde d’adulte, un enfant qui se prête au mariage que par jeu mais qui refuse de s’y laisser enchaîner contre sa volonté. Rich est un rêveur qui voit plus loin que son époque et que la triste réalité de la législation. Difficile d’imaginer quel autre acteur aurait pu incarner aussi bien ce personnage. Peut-être éventuellement Jean-Pierre Cassel qui, sous la caméra de Philippe de Broca, jouait à la même époque des jeunes premiers refusant également d’entrer dans le moule. Mais Rich possédait une finesse et une délicatesse que le fougueux Cassel n’avait pas.
Finalement bien plus qu’Antoine dans les Tontons ou Christian Martin dans Oscar, Matou est le parfait résumé du personnage de Claude Rich dans la première partie de sa carrière et même plus tard (ayant conservé toute sa malice jusqu’au bout). Et sans doute s’agit-t-il du meilleur film pour le découvrir dans sa pleine mesure (ainsi que le plus tardif mais excellent Le Souper). Cela dit, un film ne se limite pas qu’à son rôle principal. Chaque second rôle est soigné et truculent, même ceux joués par des acteurs aujourd’hui oubliés. On appréciera particulièrement Michel Serrault en inspecteur qui retournera sa veste pour être débarrassé de son acariâtre femme. Et puis il y a bien sûr Francis Blanche qui cabotine comme toujours, mais qui le fait avec tellement de talent qu’on ne peut qu’apprécier.
Si le film a aujourd’hui un petit parfum désuet du fait que les temps et les moeurs ont évolués (encore que le mariage revient à la mode chez les nouvelles générations…), il conserve son charme, sa poésie et malgré tout un petit côté subversif sans vulgarité gratuite. A redécouvrir.
Ici, la cible principale de Mocky est l’hypocrisie des « liens sacrés du mariage », qui est à l’époque un passage obligatoire des « gens biens ». Et Claude Rich, rebaptisé ici Jean-Louis Matouzec (dit « Matou ») est justement pris au piège du sien. Sa femme a beau être ravissante (incarnée par la propre femme de l’acteur), elle est plus intéressée par sa télévision, autre cible privilégiée de Mocky, que par son mari. Le couple est d’accord d’être dans l’impasse, mais Françoise - la femme - refuse de divorcer. La procédure est longue et coûteuse et surtout à l’époque une femme célibataire est dans une situation précaire. Mais ‘Matou’ est un expert un écriture, chargé de restaurer de vieux manuscrits. Il lui vient alors une idée de génie: trouver un couple prêt à faire l’échange et falsifier les documents officiels. Il passe une annonce dans le journal qui attire l’attention d’un inspecteur de la brigade mondaine. Cet inspecteur, Maurice Leloup, c’est Francis Blanche, acteur comique complètement barré et une des têtes d’affiche des Tontons Flingueurs. Celui-ci se fait passer pour le mari d’un couple prêt à faire l’échange. Coup de chance pour Matou, madame Leloup est ravissante, tandis que Françoise semble satisfait du mari de substitution. L’échange se fait à la stupéfaction de Leloup qui se rend compte que la supercherie est absolument sans faille. Commence alors entre Matou et Leloup un jeu de chat et la souris qui verra de plus en plus de partisans côté Matou (dont l’inspecteur Papin, incarné par Michel Serrault) et dont la morale ne sortira - pour une fois - pas vainqueur.
Mocky s’attaque donc au mariage et à tout ce qui l’entoure: la difficulté pour un couple de vivre hors mariage, la difficulté pour une femme d’être célibataire, les longues, coûteuse et douloureuses procédures que sont les divorces. Mais il se moque également ouvertement d’autres instances telle que l’administration de l’état ou la police. L’humour de Mocky est fantaisiste, dénué de réalisme et finalement assez proche de ce qui se faisait en bande dessinée à la même époque. On y retrouve la même folie, le même esprit rêveur de bousculer l’ordre établi que chez Franquin. D’ailleurs Matou est un véritable rêveur anarchique comme l’était Gaston Lagaffe, à ceci près que Matou est un poète là où Gaston est paresseux. Le choix de Claude Rich pour incarner le personnage est judicieux. L’acteur au regard pétillant est un enfant dans un monde d’adulte, un enfant qui se prête au mariage que par jeu mais qui refuse de s’y laisser enchaîner contre sa volonté. Rich est un rêveur qui voit plus loin que son époque et que la triste réalité de la législation. Difficile d’imaginer quel autre acteur aurait pu incarner aussi bien ce personnage. Peut-être éventuellement Jean-Pierre Cassel qui, sous la caméra de Philippe de Broca, jouait à la même époque des jeunes premiers refusant également d’entrer dans le moule. Mais Rich possédait une finesse et une délicatesse que le fougueux Cassel n’avait pas.
Finalement bien plus qu’Antoine dans les Tontons ou Christian Martin dans Oscar, Matou est le parfait résumé du personnage de Claude Rich dans la première partie de sa carrière et même plus tard (ayant conservé toute sa malice jusqu’au bout). Et sans doute s’agit-t-il du meilleur film pour le découvrir dans sa pleine mesure (ainsi que le plus tardif mais excellent Le Souper). Cela dit, un film ne se limite pas qu’à son rôle principal. Chaque second rôle est soigné et truculent, même ceux joués par des acteurs aujourd’hui oubliés. On appréciera particulièrement Michel Serrault en inspecteur qui retournera sa veste pour être débarrassé de son acariâtre femme. Et puis il y a bien sûr Francis Blanche qui cabotine comme toujours, mais qui le fait avec tellement de talent qu’on ne peut qu’apprécier.
Si le film a aujourd’hui un petit parfum désuet du fait que les temps et les moeurs ont évolués (encore que le mariage revient à la mode chez les nouvelles générations…), il conserve son charme, sa poésie et malgré tout un petit côté subversif sans vulgarité gratuite. A redécouvrir.
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