EAGLES (Rock, Pop, Folk, Country)

Eagles:


A la fin des années des années 60, la Californie est devenu le lieu où il faut être pour les jeunes musiciens qui veulent commencer une carrière dans le Rock. C’est ainsi qu’arrive du Texas un jeune groupe nommé Shiloh qui attire les regards d’une compagnie de disques grâce à la voix de son batteur, Don Henley. A la même époque, un jeune guitariste ambitieux, Glenn Frey débarque à Los Angeles. Ce dernier avait été pris un temps sous l’aile de Bob Seger lorsque les deux musiciens écumaient les clubs de Detroit. A présent, Frey forme un duo avec le chanteur et guitare J.D. Souther et les deux musiciens deviennent les co-locataires de Jackson Browne. Tous ces musiciens sont inspiré par le Rock californien de l’époque, popularisé par les Byrds et surtout Crosby Stills Nash (& Young). Un mélange de folk, de rock, de pop et parfois de country. 

Ce sont également les influences de la chanteuse Linda Ronstadt qui cherche un backing band de premier ordre. Elle recrute Glenn Frey comme guitariste et lui-même pense à lui recommander Don Henley, qu’il a rencontré peu de temps avant, et qui s’est retrouvé sans groupe suite à la séparation de Shiloh. Une tournée avec Linda, dont la popularité est grandissante, leur apprenne le plaisir de jouer ensemble et, bien que le projet de former un groupe durable avec Linda soit alléchant, les deux musiciens décident plutôt de commencer leur propre formation. Bonne joueuse, Linda leur conseille le guitariste Bernie Leadon qui avait remplacé Gram Parsons dans les Flying Burrito Brothers (un groupe mené par d’anciens membres des Byrds) et le bassiste Randy Meisner qui avait brièvement joué dans Poco.

Les quatre musiciens choisissent de se nommer les Eagles et commencent à faire leurs armes sur scène. A l’époque le groupe peine à trouver son style. Bernie Leadon, grand joueur de banjo, est plutôt fan de country et de musique folk, Glenn Frey est plus attiré par le Hard Rock des Who ou de Led Zeppelin et Don Henley aime beaucoup les ballades soul de la Motown. C’est également le constat que fait le producteur Glyn Johns lorsqu’il les auditionne.  Peu impressionné, Johns s’apprête à refuser lorsqu’il entend le groupe harmoniser à quatre voix. Voyant qu’il y a quelque chose à creuser dans cette voie, il les prend sous son aile et produit leur premier album, Eagles en 1972. Celui-ci renferme des chansons country et folk mais avec un côté pop qui leur ouvre aussitôt un plus grand public. Trois titres permettent au groupe de percer sur les radios, "Take It Easy", écrite par Frey et Jackson Browne, "Witchy Woman" qui met en valeur la belle voix rauque de Henley et "Peaceful Easy Feeling ». Cela n’empêche pas Frey de placer déjà un titre plus Rock comme "Chug All Night".

Sur l’album suivant, Desperado, Frey commence à afficher sa volonté de mener le groupe vers un son plus Hard Rock, comme sur le très bon "Out Of Control", mais cela reste les ballades et les chansons plus country qui continuent à faire le succès du groupe, comme "Desperado" ou "Tequila Sunrise". Ce sont les réticences de Glyn Johns à les laisser se lancer dans un style plus foncièrement rock qui poussera le groupe (et surtout Frey et Henley) à s’en débarrasser pour choisir à la place Bill Szymczyk. Frey a beaucoup apprécié le son qu’il a donné aux albums solos de Joe Walsh, l’ancien leader du James Gang, et pense que c’est cette voie que doit suivre son groupe. Considérant également que Leadon n’est pas un guitariste de rock très convaincant ni lui un bon guitariste de country, Frey décide d’engager un guitariste couteau-suisse, pouvant être crédible aussi bien dans un style que dans l’autre. C’est ainsi que Don Felder, un ami d’enfance de Leadon, est engagé pour jouer quelques parties solos sur On The Border, avant de rejoindre le groupe officiellement comme troisième guitariste. De quoi permettre également à Frey de pouvoir se glisser derrière des claviers en live lorsque le besoin s’en fait sentir.

Sorti en 1974, On The Border est un cap supplémentaire dans la carrière des Eagles. L’album est un énorme succès et la ballade "Best Of My Love" est au sommet des charts. Cependant, on retiendra peut-être plus "Already Gone", "James Dean" et surtout "Good Day In Hell". L’apparition au California Jam la même année continue à leur ouvrir les portes d’un public toujours plus vaste. Cette popularité des Eagles s’affirme encore plus avec One Of These Nights qui en fait des stars planétaires. La chanson titre devient un nouveau numéro 1, tandis que "Lyin' Eyes" et la ballade "Take It To The Limits" sont également de gros succès, la première gagnant même un Grammy. Le groupe n’oublie pas non plus de montrer sa face plus rock avec "Too Many Hands" et "Visions", deux titres co-signés par Don Felder.

En revanche, Bernie Leadon, malgré le fait qu’il ait signé un très bel instrumental, "Journey Of The Sorcerer", se retrouve de plus étranger dans un groupe dont il n’apprécie pas spécialement l’évolution vers un groupe rock plus conventionnel. Les tensions avec Glenn Frey sont de plus en plus fréquentes et finalement Leadon décide de quitter le groupe. Son remplaçant est déjà tout trouvé. Joe Walsh a déjà une belle carrière derrière lui comme leader du James Gang et avec sa carrière solo. Personnalité haut en couleur du fait de ses abus de substances diverses (il pourrait être le Keith Richards américain, le talent de soliste en plus), c’est un bon compositeur et un bon soliste. Certes, il est vocalement moins parfait que Leadon, mais de toute façon c’est Don Henley qui est de plus en plus le chanteur principal du groupe et Frey et Meisner sont suffisamment bons pour garder la pureté des harmonies sur scène.

Avec cet atout supplémentaire dans leur manche, les Eagles préparent leur nouvel album. L’ambition de Frey et Henley est de réaliser un album parfait et sans remplissage. Et le groupe prend donc son temps. Pour faire patienter, ils sortent leur première compilation, Their Greatest Hits (1971-1975), qui est aujourd’hui l’album le plus vendu au monde après Thriller de Michael Jackson. Mais pendant la préparation de Hotel California, les tensions dans le groupe commencent à monter. Frey et Henley se considèrent comme les leaders et compositeurs principaux et n’ont pas spécialement envie de voir d’autres marcher sur leurs plates-bandes. Alors, comme il s’agit de ménager les susceptibilités de Walsh qui a déjà une carrière derrière lui et peut les lâcher quand bon lui semble, c’est le pauvre Felder qui fait le plus les frais de cette politique. Pour Frey et Henley, Felder reste ce guitariste doué qu’ils ont engagé pour jouer de la guitare. Point. Ils sont bien content lorsque celui-ci leur fourni la base musicale d’un titre (comme pour "Hotel California"), mais s’ils l’ont laissé chanter sur l’album précédent, il n’ont pas spécialement l’intention de faire de même une seconde fois. Et si Felder, lucide, accepte finalement que Henley chante "Victim Of Love", il n’en demeure pas moins que la manière de procéder des leaders lui laisse un goût amère.

Malgré cela, l’album est une vraie réussite et, outre les deux titres déjà cités, mentionnons encore "Life In The Fast Lane" et "New Kid In Town". L’album est une nouvelle fois un énorme succès et offre deux nouveaux numéros 1 au groupe. Mais pendant la tournée, Randy Meisner commence à éprouver un certain malaise. Déjà un peu aigri d’être dans l’ombre de Frey et Henley comme compositeur et chanteur, il ne se sent plus capable de chanter une chanson aussi exigeante vocalement que "Take It To The Limit" et essaye à plusieurs reprises de la supprimer du set, sans succès. Les clashs avec Frey en coulisses sont fréquents et finissent par le départ de Meisner à la fin de la tournée. Une nouvelle fois, son remplaçant est tout trouvé. Timothy B. Schmit avait remplacé Meisner au sein de Poco et c’est à lui que ce groupe avait dû leurs titres les plus populaires. Schmit ne se fait pas prier. Le manque de succès de Poco qui n’arrive pas à sortir de son statut de groupe de seconde zone malgré d’évidentes qualités l’avait passablement découragé. Evidemment, il est loin de se douter qu’il rejoint un groupe en fin de course.

Après la sortie d’un single spécial pour les fêtes, "Please Come Home For Christmas/Funky New Year", le groupe entame l’enregistrement d’un nouvel album. Mais les tensions dans le groupe (Frey et Henley d’un côté, Felder et Walsh de l’autre) et l’épuisement des longues tournées sont tellement forts que le groupe peine à produire du nouveau matériel. Même s’il est considéré comme décevant après Hotel California, The Long Run arrive à produire une série de nouveaux succès, "The Long Run", "I Can’t Tell You Why", "Heartache Tonight" et "In The City" ainsi que quelques titres très bons même si moins connus comme "The Disco Strangler" et "Those Shoes". Mais la tournée est un véritable enfer. La tension entre Frey et Felder a atteint un point de non retour et lorsque les deux hommes manquent d’en venir aux mains lors d’un concert caritatif, il semble que c’est la fin des Eagles, d’autant que la relation entre Frey et Henley s’est également dégradée. Le groupe annonce sa séparation et sort un album live bien trop lisse, Eagles Live, en 1980, qui sera malgré tout un succès.


Les années 80 verront les membres s’essayer à des projets solos avec des succès divers. Don Henley sera celui qui réussira le mieux avec une carrière solo très lucrative et une série de tubes à la clé comme "Dirty Landry" ou "All She Wanna Do Is Dance". Glenn Frey aura également quelques succès, mais plus pour les titres qu’il écrira pour le cinéma et la télévision que pour ses albums. Schmit et Felder feront essentiellement une carrière de session man (Schmit faisant les choeurs pour plein de groupes en passant de Crosby Stills & Nash à Twisted Sister et Poison), tandis que Joe Walsh luttera contre ses démons. A la fin des années 80, les quatre membres des Eagles sont tentés de réunir le groupe, seul Glenn Frey freine des quatre pieds. Mais après être apparus ensemble dans un clip, une reformation est enfin sur les rails en 1994. Frey met cependant une condition à sa participation: Henley et lui gagneront plus d’argent que les trois autres membres du groupe. Schmit, qui voit son rêve se réaliser à nouveau, et Walsh, qui trouve une raison de vaincre définitivement ses démons, acceptent. Seul Felder grince des dents mais choisi quand même d’accepter après avoir été menacé d’être mis dehors.

Le groupe sort un nouveau  live, Hell Freezes Over, accompagné de quatre nouveaux titres dont l’excellent "Get Over It", puis enchaîne une série de tournées très lucratives. Finalement, en 2001, Frey et Henley décident de se débarrasser de Don Felder et s’ensuivent une longue série de batailles judiciaires. En 2007, les Eagles sortent enfin un nouvel album, Long Road To Eden, qui s’il remporte un grand succès ne marque pas vraiment les esprits. Les Eagles continuent par la suite à tourner. Sur scène, le groupe ressemble plus à une bande d’hommes d’affaire qu’à des rock stars, mais le public continue à se presser pour voir les anciens rois du Rock californien. Cependant, depuis la mort de Glenn Frey en janvier 2016, l’avenir du groupe est incertain. Voudront-ils continuer malgré la mort de leur bouillonnant leader ou choisiront-ils de mettre un point final à une aventure lucrative qui avait de toute façon perdu son âme depuis longtemps…

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