Gloria Swanson
De
Glory à Gloria :
C’est le 27 mars
1899 que naît Gloria May Josephine Swanson, fille unique du capitaine Joe
Swanson et de sa femme Addie, à Chicago. Surnommée Glory, la petite fille
grandit entourée de sa grand-mère maternelle, du second mari de celle-ci et est
la prunelle des yeux de ses parents. Bonne couturière, madame Swanson fabrique
les vêtements de sa fille afin qu’elle soit habillée de façon originale et la
plus recherchée que possible.
Glory n’aime pas
l’école et préfère dessiner sur ses cahiers que suivre les leçons (ce à quoi
ses parents réagiront en l’inscrivant à un cours de dessin) et sa timidité lui
donne du mal à se faire des amis. Aussi quelle n’est pas sa joie, lorsqu’à huit
ans, elle apprend que son père allait être muté, peut-être à Panama ou aux
Philippines pour organiser le transport de l’armée.
« Nous
allions déménager ! Voyager ! Plus d’école, plus de classe ! Je
n’en avais d’ailleurs pas besoin : papa était aussi savant qu’une
encyclopédie, il pourrait tout m’apprendre. »
Cependant, la réalité n’est pas aussi belle
qu’elle ne l’avait imaginée : son père est envoyé sur une île de Floride
et elle put sans problème aller à l’école du quartier. Très vite, une actrice
New-Yorkaise qui avait entendu Glory chanter au catéchisme est séduite par sa
jolie voix et la fait chanter lors d’une fête. Premier contact pour Gloria avec
le monde du spectacle, mais elle n’en gardera pas une bonne impression, ayant
chanté sans accompagnement.
Lorsqu’elle a 11 ans, son père est à nouveau
muté, dans les Caraïbes cette fois, et la famille l’y suit. Glory, déjà
enthousiasmée par la faune et la flore de Floride, en est ravie, mais malgré la
proximité de la mer, elle refusera d’apprendre à nager. Ayant chanté dans un
show musical monté par son école dans l’opéra de la ville et devant
l’enthousiasme des spectateurs pour sa jolie voix (un comble pour celle qui
allait devenir la reine du muet !), elle décide alors que sa carrière sera
celle d’une chanteuse d’Opéra.
Le
cinéma, cet art vulgaire :
A 15 ans, alors qu’elle passe quelque temps
chez une tante de New York et visite avec elle les studios Essanay, leur
attention est attirée par une scène burlesque mettant en scène une grosse
femme, en réalité un acteur du nom de Wallace Beery, principale vedette de
cette série de court-métrage bon marché.
« J’ignorais
ce que pensait tante Ida, mais je trouvais cela vulgaire, dégoûtant et stupide. »
Cependant Gloria avait retenu l’attention de
producteurs qui lui demandèrent de tourner une scène de figuration. Ayant
demandé l’accord de sa mère, Gloria accepte. Et ainsi commence une série de
jours de tournage, n’ayant pas été prévenue qu’il lui faudrait tourner
plusieurs scènes. Cependant, lorsque le studio lui propose un contrat de
figurante, la perspective d’échapper à l’école et celle de rapporter une somme
coquette pour l’époque à ses parents la convainc d’accepter. Elle tourne
quelque temps dans la série de Beery jusqu’à ce que celui-ci s’exile en
Californie suite au détournement d’une mineure, mais les autres films que l’on
lui proposa n’étaient guère plus raffinés, on lui demande de jouer des femmes
de 30 ans alors qu’elle n’en a que 16. La perspective d’être choisie comme
partenaire de Charlie Chaplin, déjà grande vedette ne l’enchante guère plus et
elle décline la proposition, n’appréciant pas son style. Aussi est-elle
soulagée lorsqu’elle apprend que son père allait être muté (encore et toujours)
pour les Philippines et que Wallace Beery invite sa famille à venir visiter la
Californie avant leur départ.
Premiers
succès, premières désillusions :
Durant le voyage vers la Californie, Gloria
découvre que sa mère a l’intention de quitter son père et que de cette façon,
leur voyage s’arrêtera en Californie. Pour la jeune fille, c’est un premier
contact avec les réalités de l’âge adulte.
En Californie, Wallace Beery les accueille.
Un Wallace différent du souvenir de Gloria : gentil, serviable, protecteur
et séduisant, bref à cent lieues du coureur de jupons d’antan. Ce dernier lui
conseille de prendre contact avec un certain Mack Sennett. En effet, Sennett
est l’un des producteurs les plus puissants d’Hollywood, dont les studios,
spécialisés dans la comédie, ont vu les débuts de Charlie Chaplin et plus tard
ceux d’un jeune gagman nommé Frank Capra.
Sennett, bien qu’il ne le montre pas, est
emballé par la jeune actrice de 16 ans et décide d’en faire la vedette féminine
d’une série de comédies. Le professionnalisme du studio, de même que jouer un
personnage du même âge qu’elle lui plaît. En plus, elle est tombée amoureuse de
Wallace Beery.
Les deux tourtereaux songent en effet à se
marier, et tant pis pour la différence d’âge (Beery a 14 ans de plus qu’elle).
C’est même un atout pour une Gloria en quête de protection. Seulement elle n’a
que presque 17 ans, donc encore loin de la majorité et il lui faut donc le
consentement de sa mère. Mais celle-ci, elle aussi séduite par le charme de
l’acteur, accepte de bon cœur.
Mais la nuit de noces tourne au cauchemar,
Wallace Beery se montre brutal envers la jeune fille absolument ignorante de
cet aspect du mariage. Désormais elle n’aura plus confiance en lui. De plus, si
la carrière de Gloria, sans que celle-ci soit une star, marche bien, celle de
Beery piétine, ses cachets sont rapidement dépensés, le poussant à emprunter à
sa femme. Seul point positif, Gloria tombe enceinte. Elle espère beaucoup de
cet enfant à venir, notamment qu’il fasse prendre à son mari conscience de ses
responsabilités. Elle parvient même in extremis à empêcher Sennett de virer
Beery. Mais ses rêves ont tôt fait de s’effacer : elle apprend que Beery
la trompe et surtout, il lui fera prendre à son insu des médicaments qui la
feront avorter. Désormais sa décision est prise : elle quitte Wally,
malgré le fait que le studio leur fasse tourner un film ensemble. Elle n’a que
17 ans et leur vie commune n’aura duré que deux mois.
Gloria quitte également Mack Sennett qui n’a
plus que des rôles burlesques (tartes à la crème et compagnie…) à lui offrir,
genre qu’elle n’apprécie guère. Elle tourne alors quelques films pour le studio
Triangle sous la direction de Jack Conway et de Frank Borzage. L’intérêt pour
cette jeune actrice monte dans le milieu, même si elle ne s’en aperçoit pas
vraiment, au point que Cecil B. De Mille, l’un des réalisateurs les plus
puissants de Hollywood décide de l’engager. Cela ne se fera pas sans mal,
Triangle n’a pas l’intention de laisser partir ce qu’ils sentent comme une
poule aux œufs d’or, et ce même si elle n’a pas signé de contrat. Mais
finalement Gloria franchit la porte de la Paramount prête à tourner avec celui
qui fera d’elle une star, et quelle star.
Une
étoile qui monte :
Si le nom de
Cecil B. DeMille est aujourd’hui resté associé aux grandes épopées bibliques,
il est injuste d’oublier qu’il était l’un des grands maîtres de la comédie
romantique du muet. Perfectionniste et chaleureux, Cecil B. DeMille ne tarde
pas à gagner la confiance de Gloria qui le vénère. Un autre homme entre
également dans sa vie, le milliardaire Craney Gartz avec qui elle commence une
relation passionnée même si les désaccords sont nombreux, comme sur la question
du mariage que Gartz considère comme une institution ridicule.
Don’t
Change Your Husband (Après la Pluie, le Beau Temps,
1919) est un succès et Gloria commence à voir les effets du vedettaria :
un salaire important, mais aussi des rumeurs sur sa vie privée. Bien
évidemment, le duo se reforme pour For
Better, For Worse (Pour le meilleur
et pour le pire, 1919) puis Male And
Female Created He Them (Et il les
créa homme et femme, 1919) dans lequel elle prend de véritables risques
comme tourner avec un lion.
Lors d’une
réception donnée par l’actrice Claria Kimball Young, grande star de l’époque,
elle fait la connaissance de l’homme d’affaire de celle-ci Herbert Somborn qui
ne tarde pas à lui faire la cour. Carney Gartz tempête d’autant que des rumeurs
de mariage avec Somborn grandissent. Gloria qui l’aime lui lance un ultimatum,
ou bien Gartz l’épouse ou bien elle accepte la proposition de Somborn. Gartz ne
peut se résoudre à s’abaisser devant elle et Swanson épouse Somborn. Elle ne
l’aime pas, mais à nouveau il possède ce côté protecteur dont elle a tant
besoin. Rapidement Herbert découvre que sa femme est sous-payée par rapport à
sa notoriété. En effet Gloria ne s’est pas rendu compte de son incroyable
popularité, pensant que ses films n’ont du succès qu’en raison de la célébrité
de De Mille et non à grâce à sa présence, ce dont son mari se presse de la
détromper.
« Pourquoi
est-ce ton nom que l’on met en gros caractères sur tous les cinémas, sur toutes
les affiches ? Les représentants de la Paramount vendent tes films grâce à
ton nom, tu comprends ? Et ils te font croire qu’ils t’accordent une
faveur en te faisant la vedette des films de DeMille, à deux cents dollars la
semaine ! »
Grâce à Herbert,
la Paramount est obligée de hausser le statut de Gloria. Malheureusement à
cause de cela elle ne pourra plus tourner avec DeMille. En effet les studios
avaient à l’époque cette politique absurde qui consistait à ne pas faire
tourner deux grands noms dans un même film. Ils auront fait six films ensemble,
six succès. Gloria regrette cette séparation qui se fera après un ultime film, The Affair Of Anatol (Le cœur nous trompe, 1920), mais en
contrepartie, elle attend un enfant. Ce sera une fille, Gloria.
Reine du muet :
Tout semble aller
pour le mieux pour Gloria ; elle a accédé au statut de star pour la
Paramount, a donc droit à une série de privilèges (gros cachets, loge
personnelle…etc) et elle est la mère d’une adorable petite fille. Mais la réalité
n’est pas aussi rose. Les films qu’elle tourne (souvent sous la direction de
Sam Wood ancien assistant de DeMille), s’ils marchent bien, ont des scénarios
de moins en moins intéressants, après pourtant des débuts prometteurs comme The Great Moment (L’heure suprême, 1921)) et surtout sa relation avec Herbert n’est
pas au beau fixe. Les affaires de ce dernier vont mal (et ce depuis le début de
leur mariage, d’où sa déception face au précédent salaire de sa femme), ils ne
se voient plus et finissent par se séparer. Le divorce n’est cependant pas
prononcé : en effet, le studio juge qu’il serait néfaste à sa carrière.
Entre temps, elle commence une relation passionnée avec Marshall Neilan, le
metteur en scène attitré de May Pickford et adopte un garçon, Joseph. Un autre
point positif cependant, elle tourne avec une autre nouvelle vedette, Rudolph
Valentino. Bien qu’elle soit flattée de tourner avec lui, son contrat lui donne
la permission de refuser de tourner avec une autre vedette. Elle profite donc
de ce point pour exiger des vacances en Europe bien méritées en échange, ce que
le studio ne peut lui refuser. Le film Beyond
The Rocks (Le Droit d’aimer,
1922) est un nouveau succès même s’il subit des dommages à cause de la censure
qui obligea de tourner deux versions : une pour le marché européen, sans
coupures, l’autre pour le marché américain avec des scènes d’amour
chronométrées !
Mais après ses
vacances il est temps pour Gloria de retourner à la dure réalité. Si la
rivalité qui l’oppose à Pola Negri n’est qu’une invention des journaux, la
demande de divorce de Herbert Samborn l’accusant d’adultère avec 14 hommes
(dont seul le nom de Neilan était justifié) et lui demandant 150.000 dollars de
dédommagement lui cause un réel souci. Le studio arriva à faire baisser les
exigences de Samborn, mais lui firent croire que le comité de censure exigeait
une clause morale qu’elle est contrainte de signer. Ce n’est que peu de temps
après lorsqu’elle rencontre le responsable du comité, William Hays, qu’elle
comprend que tout cela n’était qu’une manipulation du studio pour la tenir en
laisse et que le comité n’avait rien à voir là-dedans. Elle ne pardonnera pas
aux dirigeants de la Paramount, parmi lesquels se trouvaient son idole, Cecile
B. DeMille. Pourtant en ayant déjoué la supercherie, elle dispose d’une prise
sur le studio et exige avoir plus de liberté sur le choix de ses films à venir.
Après quelques
films de bonne qualité comme Zaza
(1923), elle décida de s’attaquer à un nouveau défi : Madame Sans-Gêne (1924), qui raconte l’histoire amoureuse de
Napoléon avec une lavandière. Le film fut tourné en France et elle obtint
l’autorisation de tourner à Fontainebleau ! Le film, tourné par Léonce
Perret fut un succès, mais surtout il lui permit de faire la connaissance de Henri
de la Falaise. Celui-ci était un aristocrate désargenté, comme il en existait
beaucoup en Europe et lui servait d’interprète. Ils finiront mariés et Gloria
marquise. Mais avant, elle dut faire un acte qu’elle allait regretter toute sa
vie. En effet elle est tombé enceinte d’Henri trop longtemps avant le mariage
pour que cela ne se remarque pas. Gloria a peur pour sa carrière et décide
d’avorter. Elle manque d’y passer, mais surtout, superstitieuse, elle
regrettera son geste, d’autant qu’elle n’arrivera plus à donner d’enfant à
Henri.
Un certain Kennedy :
Gloria a 26 ans.
Elle est l’une stars les plus connues au monde et l’une des mieux payées. Son
contrat touche à sa fin et la United Artists (compagnie fondée par Chaplin,
Pickford, Griffith et Fairbanks afin d’échapper à la domination des studios)
lui propose de se joindre à elle. Malgré les sommes astronomiques que lui
propose la Paramount (plus d’un million de dollars) elle accepte leur offre.
Elle veut être son propre maître, faire le nombre de films qu’elle souhaite,
ceux qu’elle souhaite, quand elle le souhaite. Elle dut pourtant encore
s’acquitter de deux films pour la Paramount.
Enfin vient le
moment de tourner son premier film en étant son propre chef. Gloria fait alors
face à tous les problèmes épuisants qui occupent les producteurs :
emprunts d’argent, batailles d’avocats…etc. Heureusement, elle n’est plus la
jeune débutante d’antan et les conseils qu’Herbert Somborn et Marshall Neilan
lui ont donnés par le passé s’avèrent utiles, de plus elle a du caractère et
sait se battre. The Love Of Sunya (Sunya, 1927) n’est pas aussi bon qu’elle
l’aurait voulu, mais n’est pas un mauvais film et lui a permis d’apprendre la
réalité d’un tournage ainsi que les erreurs à ne pas répéter. Pour couronner le
tout, le film obtient d’excellentes critiques.
Pour son prochain
film, Gloria décide d’engager un des jeunes réalisateurs les plus en vue, Raoul
Walsh. Celui-ci accepte. Reste à trouver un film. Tous deux sont tentés par une
adaptation de la pièce Rain .
Celle-ci est en effet un des grands succès de l’époque et tous les studios
rêvent de son adaptation, mais il y a un hic : le sujet est brûlant et
sera sans doute difficile à faire accepter par le comité de censure. Walsh et
Swanson se mettent à étudier le code Hays à la lettre, arrivent à trouver ses
failles et à arranger quelque peu l’histoire pour la rendre acceptable (sans
pour autant la dénaturer). Gloria Swanson arrive ensuite à convaincre William
Hays de leur donner son soutien. Il lui faudra ensuite se battre contre
l’association des studios qui, jaloux, essayent d’empêcher la réalisation du
film. Brandissant l’accord de Hays, elle arrive à obtenir le soutien de Marcus
Loew, le président de la MGM et à annuler le véto. Reste à penser au casting.
Gloria, bien sûr, dans le rôle de Sadie Thompson et comme partenaires masculins
Lionel Barrymore et Raoul Walsh. Le tournage sera difficile et ce n’est que
grâce encore une fois à Marcus Loew (« le
dernier gentleman de l’industrie du cinéma ») qu’elle en viendra à
bout. Malheureusement, celui-ci décédera peu après. Sadie Thompson (Faiblesses
humaines, 1928) est un succès et Gloria fait la connaissance du
milliardaire Joseph P. Kennedy.
Celui-ci essaye
en effet de s’imposer dans l’industrie du cinéma, mais sans grand succès.
L’entente avec Gloria est immédiate et tous les deux ne tardent pas à devenir
amants. Celui-ci lui posera la question d’une possible récompense aux meilleurs
artistes, ce à quoi Gloria répondra :
« Je déteste la compétition entre artistes. Si
l’on me demandait qui est le meilleur acteur entre Douglas Fairbanks et Charlie
Chaplin, je répondrais que je n’en sais rien, et que la question ne devrait
même pas se poser. Ils sont totalement différents. De même que Mary Pickford et
moi-même. »
Les Oscars sont
cependant créés et Gloria est nominée pour le rôle de Sadie Thompson. Elle ne
remportera pas le prix.
Kennedy décide de
produire un film avec Gloria et sous la direction d’un cinéaste
légendaire : Erich Von Stroheim. Cette perspective rend Gloria
enthousiaste et le début du tournage se passe comme un rêve : elle admire
le travail de Von Stroheim, il admire son jeu. Les choses se compliquent
lorsque vient le moment de tourner la deuxième partie : celle-ci se
raccorde mal à la précédente et Von Stroheim fait tourner à Gloria des scènes à
la limite de la perversité. Celle-ci appelle Kennedy au secours qui, horrifié,
stoppe aussitôt le tournage. Pour Gloria, ce n’est qu’un mauvais film, mais
pour lui c’est un échec dont il se remet mal et Queen Kelly (La Reine Kelly,
1928) restera un film inachevé et désormais culte.
« I am big, it’s the pictures that got
small » :
Alors que Queen Kelly semble bloqué, le
réalisateur britannique Eddie Goulding propose à Gloria de tourner un film
parlant. Celle-ci hésite : le procédé, malgré le succès du Jazz Singer, demande encore des
améliorations, mais Goulding a tôt fait de balayer ses hésitations et c’est
ainsi que Swanson, contrairement à Chaplin, Garbo ou Pickford qui regardent le
parlant avec appréhension, se lance dans l’aventure sonore. Pour le premier
rôle masculin, un jeune acteur impressionne par son talent lors de ses bouts
d’essais. Il s’agit d’un certain Clark Gable. Malheureusement, celui-ci ne
possède pas encore la classe qu’il aura par la suite et son côté camionneur ne
conviendra pas au rôle. La décision est prise également de tirer parti du
talent vocal de Gloria et d’en faire un film musical. The Trespasser (L’intruse,
1929) fut un grand succès et le passage du muet au parlant semble se faire sans
trop de problème pour Gloria, même si elle rate à nouveau l’Oscar. Kennedy
essaya a nouveau de s’imposer en faisant tourner Gloria dans What A Widow (Quelle veuve, 1930), mais le film fut un échec (en partie à cause
de la grande dépression). Désormais, vivant mal le fait que Gloria ait un
meilleur flair artistique que lui, ils mettent fin à leur relation. Entre temps
elle divorce avec Henri.
Les films
suivants que tourne Gloria sont de qualité médiocre, le départ de Kennedy lui a
en effet fait voir qu’elle se trouvait à la tête d’un gouffre financier et elle
n’avait eu d’autre choix que de laisser plein pouvoir au président d’United
Artists pour produire ses films. Elle fait également la connaissance du jeune
play-boy Michael Farmer qui la met enceinte avant de l’épouser. Sa fille
Michelle naît et elle commence le tournage d’un nouveau film, A Perfect Understanding (Parfait accord, 1933) avec un jeune
acteur anglais, Laurence Olivier, mais le film ne rencontre pas le succès
escompté. Elle divorce à nouveau après à peine un peu plus de deux ans de
mariage et signe un contrat avec la MGM. Pourtant le studio ne la fait tourner
que dans des films sans réel intérêt. Irving Thalberg décida de s’occuper de sa
carrière et meurt avant d’en avoir eu l’occasion. Son aventure avec Herbert
Marshall fait grand bruit, mais sa carrière est au plus bas. Elle a bien un
projet avec la Columbia qui pourrait la relancer, mais Harry Cohn finit par
refuser, considérant que l’histoire ne valait rien. Bette Davis tournera le
film pour la Warner, Dark Victory, et
le film fut un succès…
Et si l’on tournait la page ?:
Gloria décide
alors de prendre ses distances avec le cinéma. Une idée qu’elle caressait déjà
depuis longtemps, alors qu’elle était encore une star. Elle monte la société
scientifique Multiprise et accueille des savants fuyant le régime nazi. A cause
de la guerre, la société ne marchera jamais et elle sera contrainte de vendre.
Dans un même temps, elle accepte de se produire à Broadway. Malgré un trac
terrible d’affronter directement le public, le succès est au rendez-vous et sa
carrière est relancée. Les succès s’enchaînent. Le cinéma ne veut plus
d’elle ? Tant pis. Elle épouse un certain William Davey qu’elle connaît à
peine et sans réel désir . C’est sans surprise que le mariage ne dure que
trois ans. Elle se lance également dans la télévision et y remporte à nouveau
un grand succès.
Le plus grand come back du cinéma :
En 1949, Gloria
reçoit un appel de la Paramount pour venir tourner un bout d’essai. Gloria est
perplexe. Pourquoi le lui demander après le nombre de films qu’elle a tourné
pour eux ? Mais la perspective de tourner avec Billy Wilder et les
conseils de George Cukor d’accepter la convaincront. En Californie, le sujet la
séduit tout à fait. Pourtant elle n’est pas le premier choix, mais Mary
Pickford avait exigé que le rôle du scénariste soit diminué, Mae West voulait
réécrire le film et Pola Negri (qui ressemblait le plus au personnage), refusa
de jouer une has been. Gloria n’avait été choisie que bien après car semblait
inabordable. Le film est un succès sans précédent, mais ne put pourtant battre All About Eve aux Oscars. Bette
Davis et Gloria Swanson, toutes deux nominées, perdirent face à Judy Holliday,
d’avantage en raison du fait qu’il était difficile de choisir entre les deux
monstres sacrés que pour la performance de l’actrice.
« Cela ne me touchait guère ni dans un sens,
ni dans l’autre. Je connaissais trop bien Hollywood. Chaque année, les perdants
affirmaient savoir pourquoi ils avaient perdu, et les gagnants déclaraient
qu’ils ne pouvaient imaginer pourquoi ils avaient gagné. Mais personne n’était
encore mort, ou n’avait abandonné le cinéma parce qu’un autre l’avait emporté
(…) Cela m’importait réellement très peu, mais il était manifeste que tous ceux
qui m’approchèrent durant cette période s’attendaient à une autre réaction de
ma part : une réaction violente, irréfléchie, sarcastique. Bref, une
réaction digne de Norma Desmond. »
Cependant les
rôles qu’on lui propose après ne sont que de pâles copies du rôle de Norma
Desmond. Elle accepte les seuls qui lui proposent autre chose, mais dont le
résultat est indigne d’elle. Son ultime apparition au cinéma sera le film
catastrophe Airport 1975 (747 en péril, 1974) où elle joue son
propre rôle ou presque aux côtés de vedettes comme Charlton Heston, Myrna Loy
et Dana Andrews. Elle ne reste pas inactive pour autant, faisant du
journalisme, de la peinture, du stylisme et se remariant une sixième et ultime
fois avec le journaliste William Dufty de 17 ans son cadet.
Gloria Swanson
finit par s’éteindre le 4 avril 1983 à l’âge de 84 ans, non sans avoir publié
son autobiographie qui nous plongea dans la vie trépidante de celle qui fut
l’une des plus grandes stars du muet et l’une des actrices les plus douées du
cinéma.
Sources:
G. SWANSON, Gloria Swanson par elle-même, 1980
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