Errol Flynn (1909-1959)


Errol Flynn


Une enfance mouvementée :

« Je déteste particulièrement les livres qui commencent par :  Ah ! Que de joie et de bonheur dans la pittoresque maison du professeur Flynn en Tasmanie, quand les premiers cris du solide petit Errol se firent entende… »

C’est par cette phrase qu’Errol Flynn commençait le prologue de son autobiographie, aussi, fidèle à son souhait, nous ne tomberons pas dans le mélo.
Errol Flynn est né le 20 juin 1909 et, comme il le dit lui-même plus haut, en Tasmanie, à Hobart pour être plus précis.

Dès son jeune âge, Errol fait face à la sévérité (non sans raison, il faut bien l’admettre) de sa mère, Marelle, une belle femme au caractère bien trempé, au point qu’il fugue à l’âge de sept ans. En revanche sa relation avec son père, Theodore Flynn, professeur de biologie à la réputation grandissante, qu’il accompagne lors de ces recherches, est plutôt bonne. Si Errol préfère les bêtises à l’école, il a également une grande passion : la mer, passant son temps libre à nager et à rêver de partir à l’aventure sur les mers avec son grand-père, véritable loup de mer. Mais est-ce étonnant quand on sait qu’Errol descend du côté de sa mère d’un des mutinés du fameux Bounty ? Le sabre du capitaine Blight servit d’ailleurs de jouet à Errol qui ne pardonna jamais à son père d’en avoir fait don au Naval and Military Club par la suite.

Lorsque les découvertes de Theodore l’emmènent en Angleterre, Errol le suit et y entre à l’école. Renvoyé à 15 ans, il n’a aucun mal à trouver un autre établissement grâce à la réputation de son père… avant d’être renvoyé à nouveau et de retourner à Sidney. Là, pendant que son père révolutionne le monde des découvertes scientifiques (on lui doit entre autres la découverte du premier fossile de baleine préhistorique), Errol passe d’un établissement à un autre où l’on s’étonne que le fils du brillant professeur Flynn soit si dissipé. Finalement, peu avant son dix-septième anniversaire, il quitte définitivement l’école et se fait engagé par un ami de son père. Mais l’employé, un nommé Thompson, et lui sont découverts volant dans la caisse pour jouer aux courses et renvoyés. Après un bref passage dans un gang (au cours duquel Thompson trouva la mort), Errol Flynn décide, à dix-sept ans, de tenter sa chance en Nouvelle-Guinée où a lieu une ruée vers l’or.


Aventures en Nouvelle-Guinée:

A cette époque-là, La Nouvelle-Guinée est encore loin d’être une contrée civilisée, le climat et la vie y sont rudes. Fort de ses connaissances grâce à la lecture de livres de son père, il est pris à l’essai comme agent du gouvernement pour améliorer les conditions sanitaires des indigènes. Mais Errol finit par se lasser de patrouiller en jeep dans son beau costume, et lorsqu’il découvre un étang idyllique où une jolie jeune femme vient de temps à autre se baigner, il préfèrera y passer ses heures de service. Jusqu’au jour où son supérieur appréciant également le coin, mais lui après le travail, le découvre. C’est sans surprise qu’il est renvoyé, mais non sans s’être occupé de la jolie jeune fille avant et s’être sauvagement bagarré avec son mari, haut fonctionnaire du Gouvernement (ce qui lui obtint un sursis, son supérieur détestant le mari jaloux !). A la suite de cela, Errol décroche diverses travaux (contremaître d’une plantation de Copa, transporteur maritime, …) auxquels il n’y connaît rien, mais arrivant à embobiner son employeur par son aplomb, son charme et… un certain don pour jouer la comédie. C’est au cours d’un de ces métiers qu’il transporte le réalisateur Joel Swartz et son équipe pour filmer un documentaire sur le fleuve Sepik, premier contacte avec le monde du cinéma.

Alors qu’Errol s’improvise « marchant d’esclave », il contracte la Malaria et subit une embuscade des indigènes sur lesquels il sera contraint de tirer pour se défendre. Accusé de meurtre, Errol Flynn est emprisonné mais choisi d’effectuer lui-même sa défense (une expérience qu’il déconseilla vivement). Grâce à son bagout et au témoignage d’un de ses amis, Errol s’en tire, décide de monter une plantation de tabac et s’intéresse à lire les grands classiques de la littérature qu’il regrettait avoir  négligé pendant son adolescence et que son père lui envoyait à sa demande. Puis un jour, un télégramme de Joel Swartz lui demande de venir jouer le rôle de Fletcher Christian dans sa version des mutinés du Bounty en Australie. Errol saute sur l’occasion de quitter la Nouvelle-Guinée qui commence à le lasser. Après le tournage, il y retournera quand même, après avoir, malgré le dégoût que lui inspirait l’acte, volé les bijoux de la dame du monde qui l’entretenait alors. Après avoir tenté d’autres métiers tous moins recommandables que les autres, Errol décide de quitter définitivement la Nouvelle-Guinée et de rejoindre son père en Angleterre.


Voyages autour du Globe :

Sur le bateau, Errol fait la connaissance d’un colosse néerlandais, un dénommé Koets, docteur de son état avec qui il se trouve un point commun, un goût prononcé pour l’aventure et les femmes. Lors d’une escale aux Philippines, les deux compères décident organiser des combats de coqs truqués pour s’enrichir. Mais leur combine est rapidement éventrée et ils doivent fuir en sautant sur le premier bateau appareillant qui les emmène vers la Chine. En Chine, Errol perd tout l’argent gagné sous l’influence d’une entraîneuse qui le pousse au jeu. De plus, sur le bateau, on lui vole les fameux bijoux volés. Fauchés, ils s’engagent dans l’armée contre les Japonais, mais être placé en première ligne ne leur plait guère et ils s’empressent de déserter. Après un voyage mouvementé, Koets et Errol se séparent à Marseille, l’un pour rentrer au pays, le second pour aller en Angleterre avec une nouvelle idée en tête : devenir comédien ! Nous sommes en 1933 et Errol Flynn n’a encore que 24 ans…


Des débuts difficiles :

Une fois à Londres, Errol apprend ce que de nombreux acteurs voulant se lancer dans le théâtre ont découvert ou découvriront après lui : il est impossible ou presque d’obtenir un rôle si l’on n’a pas déjà fait ses preuves dans au moins une autre pièce. Système absurde qui condamne les débutants à errer jusqu’à ce qu’une bonne âme accepte de leur donner leur chance. Errol décide une fois de plus de jouer sur son culot pour parvenir à ses fins : Il fait passer sa photo précédée du texte

ERROL FLYNN
A joué dans Berea Coldeen
UN SUCCES !
A joué dans The Wake Of The Bounty
UN MALHEUR !
A joué dans Appleby’s Dilemna
A NE PAS MANQUER !
A joué dans The Gorgeous Groom
ETONNANT !

Mais ici, Errol a affaire au monde du théâtre qui n’a aucun mal à savoir que ces pièces n’ont existé que dans l’imagination de leur soi-disant interprète. Errol se rend alors à Northampton où il est engagé pour de petits rôles.

« J’allais rester un an et demi à la Northampton Repertory jouant tous les rôles : les vieilles servantes, les vieilles femmes, les chauffeurs, les maîtres d’hôtel, les détectives, les voleurs. Après avoir joué les bonnes à tout faire, on me donna quelques rôles plus importants que j’exécutais le plus souvent devant une demi-douzaine de personnes. Chaque soir les six spectateurs venaient nous voir, et ils applaudissaient. Cela nous donnait l’impression d’être appréciés, de ne pas jouer trop mal. »

Le théâtre anglais, lui, se souviendra d’Errol Flynn comme ayant été, selon ses propres dires, le plus mauvais Othello de son histoire. Et pourtant, alors qu’il avait finalement obtenu de petits rôles à Londres, La Warner le repère et lui offre un contrat de six mois à Hollywood pour cent cinquante dollar la semaine. Errol ne se le fait pas dire deux fois et accepte la proposition.

Dans le bateau qui l’emmenait vers l’Amérique se trouvaient également d’autres acteurs européens en route vers la gloire dont celle qui nous est aujourd’hui la plus connue n’est autre que Merle Oberon. Il y avait aussi l’actrice française Lili Damita, véritable star à l’époque. Malgré la peur, Errol Flynn essaya d’aborder cette dernière qui ne resta que de glace.

C’est au début de l’année 1935, à vingt-six ans qu’Errol Flynn arrive enfin à Hollywood. Sous la direction de Michael Curtiz il tourne dans The Case of The Curious Bride son premier rôle, celui d’un mort, que les mauvaises langues diront avoir été son meilleur. Peu de temps après, il croise à nouveau la route de Lili Damita et l’épouse quelques temps après.


Une célébrité soudaine :

En 1935, Jack Warner prend la décision d’imposer un couple d’inconnu dans sa nouvelle grosse production Captain Blood. Un risque qui se solda par une réussite financière, car il ne s’agissait du premier succès du couple légendaire formé par Errol Flynn et Olivia de Havilland. Cependant le tournage n’est pas un bon souvenir pour Errol qui fait une rechute de malaria et que seul l’alcool arrive à faire tenir ce qui n’est pas du goût de Jack Warner. Pourtant Errol devint en un jour une vedette. Il fait une série de films pour la MGM dont il aime l’ambiance, mais ses principales réalisations restaient pour la Warner avec The Charge Of The Light Brigade (La Charge de la Brigade Légère, 1936) et surtout The Adventures Of Robin Hood (Les Aventures de Robin des Bois, 1938) tous les deux de Michael Curtiz avec Olivia de Havilland (et où il faisait la plupart des cascades lui-même). La relation qui lia Eroll Flynn à cette dernière reste plutôt floue. Tout a été dit ou presque (dont plusieurs versions différentes par Oliva de Havilland elle-même). Ce qui semble sûr c’est qu’Oliva eut un coup de foudre pour Errol lorsqu’elle le rencontra. Quant à Errol Flynn, il déclara être vraiment tombé amoureux à l’époque de La Charge de La Brigade Légère, mais se comporta de manière maladroite en lui faisant constamment des blagues de mauvais goût comme mettre un serpent mort dans ses sous-vêtements. Ce qu’il en advint, à part les intéressés, nul ne le sait. Errol Flynn semble dire qu’il ne s’est rien passé, tandis  qu’Olivia de Havilland assure qu’ils eurent une liaison qu’elle rompit lorsqu’il devint évident qu’il ne divorcerait pas de Lili pour l’épouser…

En 1938, lassé du cinéma et voulant échapper à la jalousie possessive de Lili (non sans raison), il s’engage avec Koets dans la guerre civile en Espagne contre Franco comme correspondant. Cependant après une blessure qui le fit passer pour mort après des journaux, il rentre à Hollywood et tourne notamment The Private Lives Of Elizabeth and Essex (La Vie privée d’Elizabeth d’Angleterre, 1939) avec Bette Davis et Olivia de Havilland. Le tournage se passe mal, Bette et Errol les deux plus grandes stars de la Warner ne s’entendent pas, Bette trouvant Errol beau mais pas professionnel et Errol reconnaissant le talent de Bette mais ne supportant pas son mauvais caractère.


Son mariage bat de l’aile et il enchaîne des films d’action qui l’ennuient (surtout les westerns) dont certains restent cependant de grands moments de cinéma et sont à chaque coup des succès comme The Sea Hawk ( L’Aigle des Mers, 1940) et Santa Fe Trail (La Piste de Santa Fe, 1940), tous les deux de son réalisateur attitré, Michael Curtiz. C’est aussi vers cette époque qu’il se lie d’amitié avec l’acteur légendaire John Barrymore. Peu après la naissance de leur fils, Sean, en 1941, Lili exige le divorce et une forte pension obligeant Errol à revoir son salaire à la hausse et à tourner avec assiduité. 1941 marque également sa première rencontre avec le réalisateur Raoul Walsh avec qui il tourne They Died With Their Boots On (La Charge Fantastique) qui marque le début d’une longue amitié.


Des ennuis en perspective :

Fin 42, Errol est accusé de viol statutaire (relation sexuelle avec une mineure consentante ou pas) par deux jeunes filles. Il est rapidement acquitté, mais ayant refusé d’arroser  les juges locaux, le procès reprend de plus belle. Comprenant que l’affaire est grave, Errol fait appel à l’avocat des causes désespérées, Jerry Geisler. Pendant plusieurs moi, aux cours des quels le procès fait les gros titres des journaux devant la Seconde Guerre Mondiale, Geisler fait une défense acharnée d’Errol Flynn, réduisant à néant l’accusation des jeunes filles (dont l’une d’elle était en fait majeure) et finalement obtint un non-lieu définitif. Ajoutons à tous ces ennuis Lili qui ne cesse de demander d’avantage d’argent.

C’est pendant cette période que sort un des films qu’Errol Flynn préféra, et certainement un de ses meilleurs, Gentleman Jim de Raoul Walsh. Bien qu’il l’eût gagné, ce procès allait laisser chez Errol une cicatrice indélébile.

« Désormais, j’avais une étiquette dont je ne pourrais plus me débarrasser, dans l’esprit du public et pour toujours, associée à un procès pour viol dont le monde entier avait parlé. »

Quelques mois après le procès, Errol épouse Nora Eddington avec qui il aura deux filles, Deirdre en 1945 et Rory en 1947. Pressé par un besoin d’argent et bloqué par son contrat, Errol enchaîne les films dans des rôles stéréotypés qui ne l’intéressent guère.

« J’avais tourné quarante-cinq films pour devenir quoi ? Je ne le savais que trop. Un symbole phallique. Dans le monde entier, mon nom et ma personnalité étaient synonymes de sexe. Le Baladin du Monde Occidental, c’était moi. Mais qu’avais-je voulu devenir dans le temps, quand j’étais jeune et que le monde s’offrait à moi ? Sûrement pas ce symbole phallique universel ! »

 C’est aussi à cette période qu’il commence à boire. Un seul refuge lui reste : l’Océan où il s’échappe autant que possible sur son yach, le « Zaca » bravant parfois de véritables tempêtes et tournant deux court métrages. Peu après la naissance de sa deuxième fille, Nora et lui se séparent en bons termes (ils n’habitaient déjà plus ensemble depuis longtemps).
Il se marie pour la troisième fois avec Patrice Wymore en 1950 à Nice. Peu de temps après il est accusé une nouvelle fois de viol à Monaco, mais cette fois-ci Errol n’a aucun mal à prouver que la jeune fille n’est jamais venue sur les lieux du « crime ». Il n’empêche que cela lui porte un nouveau coup.


Crépuscule d’une vie courte mais bien remplie :

En 1952, Errol Flynn claque définitivement la porte de la Warner. Il avait avec Jack Warner une relation qui passait de grandes disputes à des moments de franche camaraderie. Celui-ci craignait Errol, sachant qu’arrêter le cinéma ne le touchait pas et connaissant son caractère emporté. Errol décide d’aller en Italie pour tourner un film et montrer à son ancien patron de quoi il est capable. Ainsi commence le tournage de Guillaume Tell dans lequel il investit tout son argent. Avait-il vu trop grand ou se fit-il rouler par les Italiens, le tout est que le film ne se finira pas, faute de fonds. Pour ajouter à cela les Etats-Unis lui réclament
840 000 dollars et Lili fait saisir sa maison pour se dédommager de sa pension en retard. Enfin, pour couronner le tout, un médecin lui apprend que l’état de son foie le condamne. L’horizon s’éclaircit légèrement avec la naissance de sa fille Arnella en 1953.


Vendant un des ses tableaux (un Gauguin), il se dédommage de quelques dettes, puis de 1953 à 1956 il passe son temps sur son bateau, sauf pour tourner quelques bides en Europe. Il pense monter un film d’action aquatique avec l’appui du Prince Rainier, projet qui tombe à l’eau lorsque le Prince ne comprend pas que l’acteur préfère utiliser des mannequins plutôt que de vrais requins ou pieuvres pour les combats. Il désire également tourner avec Clark Gable mais celui-ci, bien qu’appréciant Errol le détourne aimablement d’un tel projet, le jugeant trop instable. Il sombre encore plus dans l’alcoolisme ce qui fera dire à son amie Ava Gardner « Regardez Errol. Regardez-le donc. Quand j’étais jeune, il était le type le plus beau que j’ai jamais vu. »

Et puis, soudain, la chance tourne, Darryl F. Zanuck se souvient de lui et l’engage pour jouer dans The Sun Also Rises (Le Soleil se lève aussi, 1957) d’Henry King aux côtés d’Ava Gardner et de Tyrone Power. Puis, suite au succès, Jack Warner le contacte pour jouer le rôle d John Barrymore (un rôle que seul lui pouvait incarné) dans Too Mutch, To Soon (Une Femme Marquée, 1958), enfin il joue dans The Roots Of Heaven (Les Racines du Ciel, 1958) de John Huston aux côtés de Trevor Howard qui remplaçait un William Holden n’ayant pu se libérer de la Paramount. Trois interprétations reconnues comme ses meilleurs et montrant que le talent d’Errol Flynn avant bien souvent été sous-exploité.


« Apparemment, les gens adorent les résurrections. Les magazines se remirent à parler de moi. Hollywood redevient ce qu’il était, disaient-ils, Flynn est de retour. Ils appelaient ça un come-back. »

Mais s’il put rembourser ses dettes, son état de santé était tombé trop bas et il mourut d’une crise cardiaque le 14 octobre 1959, à 50 ans, peu après avoir publié son autobiographie, lui qui avait toujours rêvé devenir écrivain et qui écrivait

« Ce que j’aimerais être à soixante-dix ans ? J’espère de tout cœur que j’aurai encore eu huit épouses, que je pourrai considérer les dimensions de mon estomac avec respect, et que je serai encore capable de monter l’escalier de ma chambre à coucher sans douleur ni gémissement. »

Sources:

E.FLYNN, Mes Quatre Cents Coups,  1959
Documentaire "Errol Flynn, le Diable de Tasmanie" de Simon Nasht

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